Fin de Parcours

Depuis une vingtaine d’années, le thème de la mort constitue l’un des axes majeurs de mon travail de photographe. Où que ce soit dans le monde, quand je pars à la découverte d’une ville ou d’un village, je m’enquiers de l’emplacement du cimetière. Je suis rarement déçu : j’y trouve le plus souvent une foule de choses qui font mon bonheur. Car loin d’être un lieu de repos éternel morbide et sinistre, que tant de nos contemporains redoutent, le cimetière est pour moi l’endroit de l’envers du décor.

Il est riche de signes qui permettent non seulement de se faire une idée de la façon dont les vivants conçoivent et appréhendent  la mort, mais  aussi de la façon dont ils la vivent (lors de funérailles par exemple), donnant ainsi de précieux enseignements sur la culture du pays concerné. Au Brésil, en Afrique du Sud, en Inde, en Thaïlande, en Belgique, en Indonésie… j’ai assisté et participé à de nombreuses funérailles. Ce furent des moments forts, à la fois poignants et exaltants, qui m’ont marqué durablement.

Les cimetières sont comme des bornes dans le paysage, des repères essentiels dans la vie des gens. Conformes aux modèles philosophiques et religieux qui régissent notre quotidien, ils sont aussi le lieu d’une expression esthétique. Ainsi, dans de nombreux pays, ils s’apparentent à des musées en plein air où sont exposées -gratuitement- sculptures et photographies. Voilà sans doute l’une des raisons qui me poussent dans ces havres de paix : la présence improbable de cimaises, où s’expose en médaillons la « condition humaine ».

Avec mon appareil photo, j’ai récolté quelques-uns de ces portraits : certains rongés par le temps, d’autres brisés ou envahis par la végétation, d’autres au contraire merveilleusement conservés, émouvants ou drôles, dignes ou pathétiques.

Naïf, coloré, sacré à Madagascar ; romantique, classique ou baroque en Italie, l’art funéraire emprunte des voies multiples. Aristocrate ou populaire, il offre une statuaire très diversifiée sur laquelle je me suis penché à plusieurs reprises.